du lobby au provincial aussi

Pesticides

L’hypocrisie du gouvernement provincial

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québec

Sutton, le 5 août 2021 – La semaine dernière, on apprenait que le Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) se prononçait contre la hausse des limites maximales de résidus (LMR) de glyphosate proposé par Santé Canada à la demande de son principal fabricant, Bayer. Cette proposition a choqué de nombreux citoyen.ne.s et mis en lumière l’influence des lobbys de l’agrochimie sur le gouvernement fédéral. Pourtant, la situation au Québec n’est pas beaucoup plus reluisante.

Depuis 1992, le gouvernement du Québec a mis en place cinq stratégies, plan ou politique visant, entre autres, la diminution de l’utilisation des pesticides. Constat d’échec puisque le dernier rapport annuel pour l’année 2019 indique que les ventes sont légèrement supérieures à 1992, soit aucune amélioration depuis 27 ans (1).

« C’est un peu hypocrite de la part du gouvernement provincial de s’opposer à cette hausse proposée par Santé Canada quant ces derniers ne font pas grand-chose pour diminuer notre consommation de pesticides », déplore Thibault Rehn, coordinateur de Vigilance OGM. « Pour être crédible, il faudrait qu’il s’attaque aux problématiques à la source, comme celle des agronomes liés qui pourraient avoir un effet énorme sur la vente de pesticides ».

En 2020, on avait appris que le gouvernement du Québec, via la financière agricole, avait remboursé l’achat de glyphosate pour l’application pré récolte controversée (2). C’est donc l’argent des québécois.es qui a servi à payer l’utilisation de pesticides à base de glyphosate.

Des solutions à portée du gouvernement


En 2018 est entrée en vigueur l’interdiction de l’application de l’atrazine, du chlorpyrifos et de trois néonicotinoïdes sauf si leur usage est justifié au préalable par un agronome. Cette mesure a eu pour effet de diminuer drastiquement l’utilisation de quatre de ces pesticides : pour l’atrazine c’est une diminution impressionnante de 84 % en deux ans (3). Cela met en lumière que lorsque l’on demande aux agronomes liés à l’industrie de justifier leurs prescriptions de pesticides, ces derniers en vendent beaucoup moins. Le gouvernement devrait donc aller encore plus loin dans ce sens en interdisant totalement à ces agronomes liées de prescrire des pesticides. 

« Au Québec, cela fait longtemps que les médecins n’ont plus le droit de vendre les médicaments qu’ils prescrivent, pourquoi les vendeurs de pesticides ont-ils encore ce droit ? », s’interroge M. Rehn. « La séparation de la vente et la prescription agronomique est réclamée depuis de nombreuses années, qu’attend le gouvernement pour agir ? »

Au-delà des ventes de pesticides, le gouvernement du Québec considère aussi leurs impacts sur l’environnement et la santé via deux indicateurs de risque. Ces deux indicateurs de risques sont calculés depuis 2006-2008 (années de référence) et semblent être en baisse respectivement de -25 % et -10 %. Cependant, il est important de noter que pour calculer ces indicateurs le gouvernement provincial se base sur l’évaluation de Santé Canada basée principalement sur des études de l’industrie.

 

Comme l’a mis en lumière l’affaire Louis Robert, l’agronome lanceur d’alerte qui a décrié l’influence des lobbys des pesticides sur nos politiques, ces derniers ont aussi de l’influence au palier provincial.
Il est grand temps que le gouvernement du Québec leur tienne tête et mette en place les mesures connues et efficaces pour protéger la santé des agriculteur.rice.s, des citoyen.ne.s et de notre environnement. Cela le rendrait plus crédible quand vient le temps de critiquer le gouvernement fédéral dans le dossier des pesticides.

Pour consulter en format pdf ce communiqué de presse

(1) Bilan des ventes de pesticides au Québec - Année 2019 (MELCC) 
(2) L'argent des Québécois a payé l'usage controversé de pesticides, 1 déc 2020, Radio Canada 
(3)  Bilan des ventes de pesticides au Québec - Année 2019 (MELCC)