4- Pesticides: santé
Les pesticides posent des risques importants pour notre santé et pour l’environnement. Les études sur le sujet se sont multipliées, particulièrement sur le glyphosate, l’ingrédient principal de la formule Roundup de Monsanto qui est le pesticide le plus massivement utilisé sur les cultures GM. Il s’agit également du pesticide le plus vendu au Québec et ses ventes ont augmenté de 66 % entre 2006 et 2015 (1). En 2015, l’agence de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui fait de la recherche sur le cancer, le centre international de recherche sur le Cancer (CIRC) a classé le glyphosate dans la catégorie 2A – c’est-à-dire « cancérogènes probables » –, dernier échelon avant la qualification de « cancérogène certain ».
Les pesticides à base de glyphosate sont des pesticides qu’on appelle «systémiques», c’est-à-dire qu’ils s’intègrent à toute la plante, ses feuilles, ses racines, sa sève, etc. Cela signifie que les résidus de pesticides se retrouvent dans nos aliments et ne peuvent être simplement nettoyés. Pour la population en général, la nourriture représente la source d’exposition la plus importante aux pesticides. Les pesticides étant ingérés souvent et pendant de longues périodes, ils pourraient avoir des conséquences à long terme, comme le développement de cancers ou le dérèglement du système endocrinien, neurologique et reproducteur (comme cela est observé chez les animaux de laboratoire). (2)
Lors du processus d’homologation des pesticides, des études toxicologiques et écotoxicologiques doivent être présentées par les compagnies désirant mettre sur le marché canadien leurs formulations commerciales afin d’en évaluer les impacts sur la santé et l’environnement selon les exigences des organismes d’évaluation. Or, ces études analysent les impacts du principe actif seul.
D’un point de vue scientifique, cette façon de faire est très discutable, comme le souligne le Comité d’experts sur les tests intégrés pour les pesticides (3). La prise en compte du principe actif seul lors des tests toxicologiques est une lacune du processus d’homologation (3), car aucun individu n’est exposé au principe actif seulement. Plusieurs recherches (4) ont démontré que la formulation commerciale d’un pesticide peut avoir des effets plus néfastes que l’ingrédient dit actif. L’une de ces études (5) a été menée sur les 9 pesticides les plus vendus au monde, et montre entre autres que le Roundup, l’un des herbicides produits à base de glyphosate, est 1000 fois plus toxique que le glyphosate seul.
«L'usage des pesticides est maintenant tellement répandu dans notre société que nous avons tendance à oublier que ces produits sont d'abord élaborés pour détruire et contrôler des organismes jugés indésirables ou nuisibles. Lorsque l'on applique des pesticides, l'environnement peut être contaminé par ces substances, que ce soit l’eau, l’air ou le sol. Ils peuvent avoir des effets nocifs sur les organismes non visés, y compris l'être humain. C'est pourquoi de nombreux pays ont légiféré afin de contrôler la vente et l'usage de ces produits.» - MDDELCC (6)
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Exposition alimentaire
Comme dans le cas des OGM, les autorités réglementaires gouvernementales canadiennes ne connaissent pas le degré d’exposition aux pesticides des citoyen·ne·s, car il existe peu de surveillance de l’ensemble des pesticides qui peuvent se retrouver sur les aliments. Alors que les pesticides à base de glyphosate sont de loin les plus utilisés au Canada, il a fallu attendre jusqu'en 2017 pour que Santé Canada réalise les premiers tests. Santé Canada a trouvé des résidus de glyphosate dans 47% des légumineuses, 37% des produits céréaliers et 31% des aliments pour enfants testés (7). Ces résidus se retrouvent même sur de nombreux produits non GM puisque le Roundup est aussi utilisé en fin de récolte comme traitement de dessiccation.
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Pour résoudre ce problème, Santé Canada a fixé des limites maximales de résidus (LMR) de pesticides sur les aliments consommés par les humains. (8) Cependant les LMR sont malheureusement flexibles. En effet, on a vu par exemple la LMR américaine du soya passée de 5mg/kg à 20mg/kg en 1997 au moment de la commercialisation du soya GM. En 1999, l’Europe fait passer sa LMR pour le soya de 0,1 à 20 suite aux premières importations de soya GM provenant d’Amérique.
Ces normes légales ne sont pas des standards de santé, mais plutôt des valeurs de production agricole. Ces valeurs sont établies à partir des tests dans les champs nécessaires à l’homologation d’un produit. (9) (10) Ce sont donc les fabricants qui fixent les LMR à partir de leurs rapports en champs et offrent aux producteur·rice·s agricoles la garantie qu’elles ne seront pas dépassées s’ils suivent les directives sur l’étiquette.
Il n’est donc pas surprenant de voir que les normes ainsi fixées sont rarement dépassées. Cependant des risques demeurent, car l’impact sur la santé de la présence de plusieurs pesticides différents en même temps dans un aliment est peu connu. (11)
(1) Report on Sales of Pesticides in Québec, Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC). (en ligne)
(2) Pesticides en milieu agricole, Chapitre 3, Rapport du commissaire au développement durable, Printemps 2016, Rapport du Vérificateur général du Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2016-2017.
(3) CETIP, Comité d’experts sur les teste intégrés pour les pesticides. (2012). Nouvelles technologies et évaluation de la sécurité chimique. Conseil des académies canadiennes, Ottawa.
(4) Defarge, N., et al. (2016). "Co-Formulants in Glyphosate-Based Herbicides Disrupt Aromatase Activity in Human Cells below Toxic Levels." Int J Environ Res Public Health 13 (3).
(5) Mesnage, R., et al. (2015). Potential toxic effects of glyphosate and its commercial formulations below regulatory limits.Food Chem Toxicol., 83 : 133-153. (en ligne)
(6) Définition des pesticides du Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte aux Changements climatiques (MDDELCC) visité le 11 avril 2016 , (en ligne)
(7) Santé Canada. (en ligne)
(8) Santé canada, site visité le 22 février 2018. (en ligne)
(9) Davies, Les, Michale O’Connor et Sheila Logan, (2004). Chronic Intake. Hamilton, Denis et Stephen Crossley (éds), Pesticide Residues in Food and Drinking Water. Huamn Exposure and Risks, John Wiley & Sons Ltd, Chichester : 213.
(10) Maclachlan, Dugald J. et Denis Hamilton. (2010). Estimation methods for Maximum Residue Limits for pesticides. Regulatory Toxicology and Pharmacology, 58 : 208-218.
(11) Pesticides en milieu agricole, Chapitre 3, Rapport du commissaire au développement durable, Printemps 2016, Rapport du Vérificateur général du Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2016-2017.