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Évaluation des OGM

Le gouvernement laisse les lobbys faire leurs propres règlements

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Poignée de mains

Sutton, le 19 septembre 2022 – On apprenait ce matin que l’Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) utilise directement des documents créés par les représentants de l’industrie des pesticides et des OGM comme proposition réglementaire des nouvelles semences OGM, créées via l’édition du génome.
 

En effet, il a été découvert qu’un document de travail, partagé par l’ACIA à de nombreux groupes pour consultations, avait été originellement créé par une employée de Croplife Canada.
 

Croplife est la branche canadienne du regroupement mondial des principaux fabricants de pesticides et OGM : Bayer, Syngenta, Corteva et BASF. Plus tôt cette année, Santé Canada avait déjà procédé à des changements réglementaires similaires demandés par l’industrie (1), ouvrant la porte à un dangereux précédent.

Réformons nos systèmes d’évaluations

«Depuis plusieurs années, on savait que le lobbying travaillait fort afin de déréglementer les nouveaux OGM créés via l’édition du génome. On ne se doutait pas que c’était eux qui pouvaient directement rédiger les ébauches de changements réglementaires, c’est scandaleux» s’indigne Thibault Rehn, coordinateur de Vigilance OGM.

La situation révèle au grand jour l’habitude du gouvernement à travailler main dans la main avec l’industrie de pesticides et OGM et cela au détriment des agriculteurs, de notre santé et celle de notre environnement. 

«Ces sandales s’enchaînent comme celui de la proposition de Santé Canada d’augmenter la présence de résidus de glyphosate dans nos assiettes et cela à la demande de Bayer, son principal fabricant ! Il est grand temps de réformer en profondeur nos systèmes d'évaluation des OGM et des pesticides» réclame M Rehn. «Les évaluations doivent se baser sur la science indépendante et non pas sur les demandes des lobbys visant à maximiser leurs profits».


Quand le gouvernement laisse l’industrie s’auto-évaluer

Le document dont il est question devait servir de base afin de déterminer si une plante est assujettie à la Partie V du Règlement sur les semences. (2) Les lobbys souhaitent quant à eux que certains nouveaux OGM ne soient plus assujettis à la Partie V. Cela signifie que : 

  1. L’industrie pourrait mettre directement sur le marché certaines nouvelles semences OGM sans aucune évaluation préalable par le gouvernement. Le gouvernement ferait donc confiance à l’auto évaluation faite par l’industrie.
     
  2. Ces semences ne seraient plus obligatoirement listées par le gouvernement et il deviendrait donc impossible de savoir quelles semences OGM se retrouvent dans nos champs et donc nos assiettes. Encore une fois, le gouvernement compte sur la bonne foie de l’industrie en mettant en place un système de transparence volontaire : le choix revenant au fabricant d’annoncer, ou non, la mise en marché de ces semences OGM.

 

Le bio menacé :  l'agriculture en danger

Comme dénonce Christian Legault, consultant pour la Filière biologique du Québec, ces changements réglementaires sont : «une menace directe à l’ensemble du marché des produits biologiques, autant au Québec qu’au Canada.» (3).

En effet, si cette réforme est appliquée, les producteurs bios pourraient planter sans le savoir des semences issues de l'édition génomique ou donner à manger ces végétaux à leurs animaux. Au bout de la chaîne, les consommateurs seraient aussi dans l'ignorance.

Rappelons que les variétés de végétaux issues du génie génétique sont interdites en production biologique. Face à ces changements réglementaires proposés par l’ACIA et déjà effectués par Santé Canada, un véritable front commun se dresse pour prendre la parole.

Ces changements réglementaires ont été dénoncés par plus de 105 groupes à travers le Canada dont une vingtaine au Québec, qui ont fait parvenir au nouveau ministre de la Santé et à la ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, une lettre appelant à la transparence et à la surveillance par le gouvernement de tous les aliments et semences génétiquement modifiés, il y a presque un an. (4) Plus récemment, ce sont des organismes Québécoises majeurs comme l’Union des producteurs agricoles (UPA), le Conseil de la transformation alimentaire du Québec (CTAQ), la Filière biologique du Québec (FBQ) et le Conseil des appellations réservées et des termes valorisants (CARTV) qui ont interpellé le gouvernement par voie de communiqué. (5)


La COP 15 au Canada

Du 5 au 19 décembre prochain aura lieu la COP15 à Montréal, un sommet de l’ONU crucial pour fixer des objectifs de protection de la biodiversité. Dans ces négociations, le Canada aura un rôle majeur en tant qu’hôte. La prévention des risques biotechnologiques est au cœur des négociations de la Convention sur la diversité biologique avec le Protocole de Cartagena, signé à Montréal en 2000 et depuis ratifié par plus de 173 pays, mais pas par le Canada (6) :

« À la veille de ce sommet primordial, quel exemple le gouvernement du Canada souhaite donner ? Celui d’un pays qui laisse ces évaluations aux mains des lobbys ou celui qui se tient debout pour protéger la biodiversité et la santé de ces citoyen.ne.s. ? » se questionne Thibault Rehn.


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Plus d’informations : 

Thibault Rehn, Coordinateur de Vigilance OGM – 514-582-1674 , contact@vigilanceogm.org
 

 

Références : 

(1) Nouveaux OGM : Santé Canada abdique devant la pression des lobbys, 19 mai 2022 

(2) Commentaire sur la proposition de l'ACIA de réglementer les plantes génétiquement modifiées, Union Nationale des agriculteurs, 2 septembre 2021

(3) Les produits biologiques sont menacés par une réforme fédérale, selon Québec, Radio Canada, 14 septembre 2022

(4) Appel à la transparence et à la surveillance gouvernementale pour tous les aliments et les semences génétiquement modifiés : Aucune exemption réglementaire ne doit être tolérée, 7 novembre 2021 

(5) OGM et édition génomique - L'approche volontaire de Santé Canada jugée insuffisante, 22 juin 2022

(6) Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques relatif à la Convention sur la diversité biologique, Montréal, 29 janvier 2000

 

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