ENQUÊTE
Cocktail de pesticides dans nos eaux potables
TIOHTIÁ:KE / MONTRÉAL, lundi 6 octobre 2025 – Après le glyphosate, Vigilance OGM dévoile aujourd’hui des analyses complètes sur la présence de pesticides dans les eaux potables de dix villes du Québec – principalement en Montérégie, dans les territoires agricoles le long des rivières de la Richelieu et de la Yamaska — à partir d’échantillons prélevés en pleine période d’épandage. Chacun des résultats excède le seuil de qualité de 0,5 μg/L recommandée par l’OMS (et appliquée dans l’Union européenne) pour la concentration totale de pesticides et métabolites dans l’eau potable.
L’évaluation des pesticides, fortement critiquée au Canada (1), omet d’intégrer l’étude de l’effet dit cocktail, c’est-à-dire l'interaction entre l’ensemble des ingrédients présents dans la formule commerciale d’un pesticide, ainsi que celle de tous les pesticides épandus dans l’environnement entre eux, et de leurs produits de dégradation (métabolites). Pourtant, notre exposition à une variation toujours plus large de pesticides inquiète de plus en plus — même à faible dose (2).
« L'incapacité de Santé Canada à évaluer l'effet cocktail rend notre système d'homologation des pesticides obsolète », déplore Bruce Lanphear, médecin et professeur en sciences de la santé à l’Université Simon Frase. « Malgré les avertissements répétés des groupes de défense de l'environnement et de la santé publique, Santé Canada persiste à ignorer le problème et à s'accrocher à des méthodes dépassées. », précise celui qui avait démissionné avec fracas de son poste de co-président du comité consultatif scientifique du Conseil consultatif de la gestion des pesticides de Santé Canada (3).
Des situations inquiétantes
Toutes les eaux municipales présentent entre un et cinq pesticides dépassant les seuils européens de qualité de l’eau potable qui sont de 0,1 μg/L. La concentration de 2,4D à Sainte-Hyacinthe va même jusqu’à 56 fois ce seuil européen.
« L’exposition aux pesticides via l’eau potable est bien réelle au Québec. À St Hyacinthe et Sorel-Tracy, ce sont 5 seuils européens de qualité de l’eau que l’on dépasse : combien de temps allons-nous continuer à jouer à l’autruche ? On doit rapidement réajuster nos réglementations », conclut Thibault Rehn, coordonnateur de Vigilance OGM. « Respecter le principe de précaution, c’est une question de santé publique ».
L’urgence à nos portes
Une étude récente (4) montre que les stations de traitement des eaux au Québec ne diminuent pas significativement les pesticides. Dans le cadre de sa campagne Ma municipalité sans pesticides, Vigilance OGM invite les municipalités à abaisser leurs seuils de détection lors des analyses d’eau potable et à adopter des mesures concrètes pour protéger la population, tout en exerçant une pression sur les paliers gouvernementaux supérieurs.
En effet, la meilleure protection pour nos ressources en eau consiste à réduire à la source notre usage des pesticides. La tendance actuelle est loin d’atteindre les objectifs de réduction fixés (5). Plusieurs villes se sont dotées d'un Plan de protection de leurs sources d'eau potable — qui n’inclut pas nécessairement l’enjeux des pesticides.
« En plein contexte de changements climatiques, ou la quantité d’eau disponible diminue, les concentrations des contaminants sont appelées à augmenter, incluant celle des pesticides » alerte M.Rehn. «Il est donc urgent d’agir dès maintenant et de façon concertée entre les différents paliers gouvernementaux » (6).
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Nous vous recommandons fortement de consulter le rapport complet, notamment pour les détails concernant la méthodologie des analyses effectuées par l'Université de Montréal (Sébastien Sauvé) et l'ensemble des recommandations de Vigilance OGM.
Contact :
Laure Mabileau, communication@vigilanceogm.org, 438 395-6121
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(1) Louise Vandelac et Marie-Hélène Bacon (et autres signataires), Une réforme urgente de la réglementation s'impose à Santé Canada, Le Devoir, 10 juin 2021
(2) Les pesticides sont nocifs même à faible concentration, Enzo Trouillet, La Presse, 30 avril 2024
(3) Pesticides : démission « révélatrice » d'un scientifique nommé par Ottawa, Thomas Gerbet, Radio-Canada, 18 juillet 2023
(4) Xiameng Feng, Zhen Liu, Sung Vo Duy, Lise Parent, Benoit Barbeau, Sébastien Sauvé,Temporal trends of 46 pesticides and 8 transformation products in surface and drinking water in Québec, Canada (2021–2023): Potential higher health risks of transformation products than parent pesticides, Water Research, Volume 277, 2025
(5) Bilan des ventes de pesticides au Québec, année 2023, MELCCFP
(6) Vigilance OGM, revendications de la campagne Sortir du glyphosate, 2021