Coton

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1. Le coton c’est quoi ?

 

Le coton est une fibre végétale qui entoure les graines des cotonniers «véritables», un arbuste. Cette fibre est généralement transformée en fil qui est tissé pour fabriquer des tissus. Le coton est la fibre naturelle la plus produite dans le monde, principalement en Chine et en Inde qui représentent à eux deux environ 50% de la production mondiale. Le coton est utilisé pour fabriquer des vêtements légers depuis des millénaires dans les régions au climat tropical.

Coton, esclavagisme et capitalisme


Le coton est une culture qui demande beaucoup de main d’œuvre. Cette culture fut l’un des moteurs de la «révolution» industrielle. Via le commerce triangulaire qui permettait des échanges entre l'Europe, l'Afrique et les Amériques pour assurer la distribution d'esclaves noirs aux colonies du «Nouveau Monde» pour approvisionner l'Europe en produits de ses colonies et pour fournir à l'Afrique des produits européens et américains, le coton est devenu une ressource économique importante. L’Europe était dépendante des cultures de coton américaines. À la fin du 19e siècle, la guerre de Sécession a constitué «un tournant dans l'histoire du capitalisme» (1) puisque face à l'effondrement temporaire des importations de coton américain pendant la guerre, l’Europe est forcée de se tourner vers les pays d’Asie et du Moyen-Orient. Le gouvernement colonial britannique force les agriculteurs Indiens à cultiver la seule denrée dotée d'une véritable valeur financière à leurs yeux: le coton.

 

2. Qui produit du coton GM ?

 

En 2018, 32,9 millions d'hectares de coton ont été plantés dans le monde, dont  76%, soit 24,9 millions d'hectares, était génétiquement modifié. Le coton est la 3e culture GM de par son importance représentant 13 % des superficies mondiales d’OGM. (2)

Même si 15 pays ont cultivé du coton GM en 2018, les 5 plus grands producteurs de coton GM représentaient à eux seuls 95% de la production mondiale. Ces pays producteurs sont l’Inde (11,06 millions d'hectares), les États-Unis (5,06 millions d’hectares), le Pakistan (2,80 millions d'hectares), la Chine (2,93 millions d'hectares) et le Brésil (1,02 millions d'hectares)  (2)

 

3. Pourquoi on le modifie ?

 

Le coton GM est doté d’un ou deux traits particuliers. L’un produit une tolérance aux herbicides à base de glyphosate, comme le Roundup de Monsanto, et l’autre stimule la production d’une toxine mortelle pour le ver du cotonnier, l’un des principaux ravageurs du coton. Ce coton résistant aux ravageurs est conçu avec un gène de la bactérie Bt (Bacillus thurengiensis) – c’est le plus couramment cultivé, il représente 72,85 % de toutes les cultures de coton GM. (2)

 

4. Problématiques

 

Les études de cas des cultures du coton en Inde et au Bukina Faso sont très révélatrices des difficultés que rencontrent les agriculteurs lors qu’ils utilisent cette technologie.

Le Burkina Faso abandonne le coton GM


Le Burkina Faso est l’un des plus gros producteurs africains de coton, et cette culture est considérée comme la locomotive du développement agricole dans le pays. Le Burkina Faso a commencé à cultiver le coton produisant son propre insecticide, le coton «Bt» en 2008. Les compagnies de biotechnologie et les médias avaient alors annoncé que la productivité du coton Bt était miraculeuse et que les rendements seraient accrus. En réalité, la culture du coton Bt a été accompagnée de problèmes techniques persistants, depuis le début des premières cultures et cela s’est aggravé avec le temps.


Après deux saisons seulement, les fermiers protestaient déjà car leurs récoltes de coton avaient perdu en qualité en raison de la taille trop courte des fibres obtenues. Ainsi, ces fermiers ne sont pas parvenus à obtenir un prix correct pour leur production, en dépit de l’investissement coûteux dans la technologie des OGM. Le prix des semences de coton Bt est en moyenne 18 fois plus élevé que le coton conventionnel. Beaucoup de fermiers ont également fait état de faibles rendements, partiellement attribués à la nécessité d’appliquer des doses très précises d’engrais et de pesticides pour obtenir de bons rendements, une pratique à laquelle les fermiers ne sont pas habitués. Sur les deux dernières campagnes cotonnières (2014-2015 et 2015-2016), les rendements ont été inférieurs de 7% à ceux du coton conventionnel. En conséquence, les producteurs qui ont eu recours au coton Bt ont été perdants: leur profit moyen est inférieur d’environ 7% à celui des producteurs de coton conventionnel. (3)

Après moins de 10 ans le Burkina Faso abandonne la culture de coton GM


L’Inde entre échec et suicide


Le coton est une importante culture de rentes en Inde qui le deuxième producteur mondial derrière la Chine. Le coton Bt résistant aux insectes a été introduit par Monsanto en 2002. La compagnie avait alors promis aux agriculteurs une diminution de l’utilisation de pesticides ainsi qu’une augmentation des rendements et donc des revenues.


Même si les premières années, certains agriculteurs ont noté une réduction de l’utilisation de pesticides et une diminution des pertes de récoltes, la tendance a vite changé et cela de manière radicale.
Le coton Bt a été un échec foudroyant dans certaines régions. Dans l’état d’Andhra Pradesh, le gouvernement estime que sur 70% des 1,9 million d’hectares où du coton Bt  a été semé en 2011, le rendement a chuté de plus de 50% (4) et ce n’est malheureusement pas un cas isolé. Plusieurs facteurs viennent expliquer cet échec:

  • la piètre qualité des semences,

  • l’émergence de ravageurs secondaires,

  • la résistance développée par le ver du cotonnier

  • la technologie Bt, mise au point aux É.-U., n’est pas adaptée aux conditions agricoles de l’Inde. (5)

Comme dans le cas d’autres cultures GM, le ver du cotonnier résistant au coton Bt est apparu. Les agriculteurs ont été forcés d’utiliser plus de pesticides pour le contrôler. Aussi des ravageurs secondaires comme des thrips, des cochenilles et des pucerons ont commencé à devenir problématiques alors qu’ils ne l’étaient pas auparavant.(6) Les agriculteurs utilisent maintenant des pesticides hautement toxiques pour gérer ces nouveaux problèmes. Par conséquent, au cours des dix dernières années, les données du gouvernement démontrent que l’utilisation de pesticides est restée la même ou a augmenté dans la ceinture du coton.(4)

La semence Bt, que les agriculteurs doivent acheter chaque année auprès des semenciers, est trois à huit fois plus chère que les semences hybrides classiques, et beaucoup plus chère que les semences locales que les agriculteurs trouvaient sur le marché il y a vingt ans. (7) Le coton Bt exige aussi davantage d’irrigation et d’engrais pour produire de bons rendements, ce qui fait encore grimper les coûts. La dépendance des agriculteurs envers les intrants agricoles à prix élevé n’est pas un phénomène nouveau, mais elle s’est amorcée avec l’introduction de coûteuses semences hybrides de marque déposée et s’est exacerbée avec l’introduction du coton Bt de Monsanto. Le coton Bt n’a pas réussi à remplir ses promesses et il a coûté très cher en vies humaines.

 

Un constat effrayant a été fait: 250 000 agriculteurs indiens se sont suicidés depuis 15 ans. (9)

 

La plupart des petits agriculteurs doivent emprunter pour acheter des semences, des pesticides et des engrais coûteux à chaque saison de cultures. Quand les rendements baissent, que la récolte est mauvaise ou que le marché du coton s’effondre, les agriculteurs incapables de rembourser leur prêt sont pris dans une spirale d’endettement et de pauvreté. Des groupes de défense des agriculteurs en Inde relient le monopole des semences, le coût élevé des intrants et l’endettement aux suicides d’agriculteurs indiens dans les dix dernières années, survenus en majorité dans la ceinture du coton. (8)

 

Drame du coton OGM en Inde
(1) Empire of Cotton: A New History of Global Capitalism, Sven Beckert, 2014.
 
(2) James, C. (2018). Global Status of Commercialized Biotech/GM Crops: 2018. ISAAA brief No. 54. International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications (ISAAA): Ithaca, NY. (en ligne)
(3) LE COTON BT ET NOUS La vérité de nos champs ! Synthèse des résultats d’une recherche paysanne sur les impacts socio-économiques du coton Bt au Burkina Faso COPAGEN 2017. (en ligne)
(4) 10 Years of Bt Cotton: False Hype and Failed Promises, Cotton farmers’ crisis continues with crop failure and suicides, Coalition for a GM Free India (CGMFI), 2012. (en ligne)
 
(5) Remarkable Success, and Four Ugly Facts. Field Questions, Stone, G.D., 2012. Bt Cotton. (en ligne)
 
(6) 10 years of Bt in India. Central Institute for Cotton Research, Kranthi, K., 2011. (en ligne)
 
(7 ) Le coton génétiquement modifié , contexte 2013, CBAN. 
 
(8) Navdanya, Navdanya International, the International Commission on the Future of Food and Agriculture, with the Centre for Food Safety. 2011. The GMO emperor has no clothes: A Global Citizens’ Report on the State of GMOs- False Promises, Failed Technologies. (en ligne)
 
(9) Sainath, P., 2011. In 16 years, farm suicides cross a quarter million. The Hindu. 29 Oct.

 

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